Compte rendu de la réunion de dialogue social du 6 mai 2020 – gestion de la crise sanitaire

Extraits des principaux points abordés durant cette réunion :

La gestion de la crise sanitaire et la reprise d’activité :

Alors que les lignes directrices fixées par le Conseil d’Etat ont été fixées en tenant compte d’un déconfinement général, les dernières annonces gouvernementales obligent les chefs de juridiction à se poser la question de savoir comment adapter les mesures de reprise d’activité à des départements qui ne connaissent pas les mêmes situations.

Pour mémoire, ces lignes directrices prévoyaient une reprise possible des audiences à compter du 11 mai, ainsi que:

  • la désinfection des locaux,
  • dans toute la mesure du possible, un maintien en télétravail jusqu’en septembre,
  • la mise à disposition de gel hydroalcoolique pour les personnes en contact direct avec le public,
  • le renvoi à des précisions ultérieures sur le port des masques.

Si le plan national de déconfinement n’est toujours pas connu, il paraît peu probable que la règle générale d’interdiction des déplacements au-delà de 100 km puisse par elle-même, juridiquement, s’opposer au fonctionnement des juridictions. En effet, alors que les déplacements étaient strictement interdits, les déplacements des magistrats pour raisons de service constituaient déjà l’un des cas dérogatoires autorisés. En cohérence, il semble donc acquis que les magistrats ne pourront se voir opposer la règle des 100 km lorsqu’ils devront participer à une audience, ou tout simplement pour venir en juridiction, pour notamment assister à une séance d’instruction ou mettre en état leurs dossiers.

En revanche, en cohérence avec les mesures gouvernementales annoncées, s’il sera possible de quitter un département en zone rouge pour se rendre dans un département en zone verte, l’inverse demeurera peu recommandé. Les écoles maternelles et élémentaires n’accueilleront pas la totalité des élèves, tandis que les collèges et les lycées resteront fermés. Il devra d’ailleurs en être tenu compte dans la charge des magistrats concernés.

Il y a également de fortes chances que le fonctionnement des juridictions soit impacté par les règles de déconfinement applicables en zone rouge. Si ce n’est pas le sens des dernières annonces gouvernementales, il n’est pas encore exclu que le déconfinement y soit même reporté.

S’agissant de la tenue des audiences :

Aucun déplacement ne doit venir alourdir le travail des services de réanimation, déjà fortement en tension.

Cependant, le siège et le ressort des juridictions doivent être distingués.

Une juridiction peut avoir son siège dans un département en zone verte, mais avoir un ressort couvrant des départements en zone rouge, ou l’inverse. Son ressort peut également intégralement se situer en zone verte, ou en zone rouge.

L’USMA a défendu l’idée que le fonctionnement des juridictions ne devait pas entrer en contradiction avec les objectifs prioritaires nationaux. Avec beaucoup de précaution, elle a avancé les hypothèses de travail suivantes :

1° Lorsque l’intégralité du ressort d’une juridiction se trouve en zone verte, l’USMA ne s’oppose pas à la mise en œuvre des plans de reprise, à la condition que l’ensemble des mesures prophylactiques préconisées par les lignes directrices du Conseil d’Etat puissent effectivement être mises en œuvre : gel hydro-alcoolique disponible à l’entrée des salles d’audience, mise à disposition ou disponibilité de masques pour tous, limitation à 10 le nombre de personnes présentes en salle d’audience.

2° A l’inverse, lorsque l’intégralité du ressort d’une juridiction se situe en zone rouge, l’USMA trouverait cohérent de subordonner toute reprise d’activité à la condition de ne pas remettre en tension des services hospitaliers. Il en va de même lorsque le siège de la juridiction se situe dans un département en zone rouge. Consciente des difficultés occasionnées par une reprise différée, l’USMA est sur ce point dans l’attente de précisions. Pourraient cependant être enrôlés les dossiers des collègues concernés par un mouvement de mutation ou une promotion, pour éviter qu’un travail de préparation ne soit inutilement perdu.

3° Lorsque le siège d’une juridiction se situe dans un département en zone verte mais que certains départements du ressort se situent en zone rouge, l’USMA préconise la tenue des audiences pour les seules affaires concernant les départements situés en zone verte, ainsi que les affaires concernant les départements situés en zone rouge pour lesquelles les parties, interrogées en ce sens, auraient fait part de leur choix de ne pas assister aux audiences.

Subsidiairement, l’USMA persiste dans sa demande tendant à ce que des audiences puissent, même partiellement, se tenir au moyen de dispositifs en visio, pour ceux des rapporteurs et des rapporteurs publics présentant une vulnérabilité particulière, résidant dans ces départements à risque, ou pour lesquels la venue en juridiction implique des transports en commun les exposant tout particulièrement. La solution aujourd’hui retenue, tenant à leur remplacement systématique par des collègues volontaires, induit un alourdissement considérable de la charge de travail des intéressés, fait perdre inutilement le travail des collègues empêchés, les oblige à reprendre les projets de décision après le délibéré, auquel ils n’auront donc pas participé.

Les arguments techniques avancés, tenant au secret du délibéré, ne nous ont pas convaincus.

Les présidents ayant un rôle à jouer en ce qui concerne la police de l’audience, l’USMA a convenu que leur situation apparaissait plus délicate.

S’agissant des personnels mobilisables :

Les lignes directrices prévoient un recensement des personnels en capacité de venir au tribunal en fonction de leur vulnérabilité, de leur éventuelle contagiosité ou de leurs obligations de garde d’enfants. Il semble nécessaire d’ajouter quelques critères à ce recensement.

Les personnels devant se rendre au travail par les transports en commun sont exposées à des difficultés et à un risque de contamination qui doit être pris en compte pour déterminer si leur présence est nécessaire.

Comme pour les justiciables, il n’est peut-être pas souhaitable que les magistrats, même s’ils pourront parcourir plus de 100 km pour venir à une audience, se déplacent d’un département de fort risque vers un département de moindre risque, que ce soit pour venir à l’audience ou rentrer chez eux.

Enfin, se posera, on l’espère à la marge, la question de la politique de confinement des membres d’une juridiction, en cas d’infection de l’un d’entre eux, ou d’un de ses proches.

S’agissant de la gestion du public :

Les plans de reprise d’activités des juridictions devront déterminer le nombre de personnes que leur salle d’audience peut accueillir, sur la base d’un espace de 4 m² par personne.

Ils doivent prévoir des lieux d’attente, avant l’accès à la salle d’audience, respectant les mêmes règles. Un sens de circulation dans les locaux doit être matérialisé afin d’éviter que les personnes ne se croisent. Il convient d’étudier la possibilité de faire des circuits différents pour le personnel et pour le public. Les plans doivent recenser les espaces d’instruction et de délibéré.

S’il n’apparaît pas possible, au vu de la configuration des lieux, d’avoir une organisation suffisamment sûre, les juridictions doivent pouvoir renoncer à la tenue d’audiences publiques.

S’agissant des bonnes pratiques en salle d’audience :

L’USMA rappelle que le virus se propage par des gouttelettes en suspension dans l’air, et qu’en conséquence, un lieu de parole clos, telle qu’une salle d’audience, doit susciter une vigilance particulière.

Le port du masque à l’audience ne doit pas être prohibé pour les membres de la juridiction. A ce titre, l’USMA demande que lui soient signalés les plans de reprise posant une difficulté sur ce plan. Les parties doivent également y être encouragées.

Une attention toute particulière doit être portée au cas des salles d’audience dites aveugles, ou ne disposant pas de possibilité d’aération naturelle, dès lors que les systèmes de ventilation et climatisation doivent en principe être arrêtés.

Le calendrier des élections professionnelles :

Juridiquement, le Secrétariat général considère que la prolongation de l’état d’urgence ne fait pas obstacle au maintien des élections professionnelles, en considérant que le mandat des élus du CSTA n’arrivent pas à échéance pendant la période prévue à l’article 1er de l’ordonnance n° 2020-347 du 27 mars 2020 adaptant le droit applicable au fonctionnement des instances collégiales administratives pendant l’état d’urgence, celle-ci ne faisant référence qu’à l’état d’urgence déclaré par la loi du 23 mars 2020 et non sa prorogation.

L’USMA a rappelé à l’aune de ce nouvel exemple la nécessité de ne plus regarder le CSTA comme une « instance collégiale administrative » au sens de ces dispositions, mais comme un conseil supérieur de la magistrature administrative.

Vos représentants ont également insisté pour que l’organisation des élections puissent se tenir dans de bonnes conditions. En dépit du retard pris, le Secrétariat général tient au maintien de ces élections. Il conviendra, en tout état de cause, de s’assurer que le matériel de vote pourra être acheminé vers les juridictions, qu’un délai puisse être laissé aux juridictions pour orienter ce même matériel vers ceux des magistrats qui ne pourront venir en juridictions, afin que chacun puisse être mis en mesure de voter.

La réforme de l’évaluation des magistrats et la campagne 2020 :

Si l’évaluation des magistrats doit se faire selon les modalités proposées par les groupes de travail Massias et Hoffmann, 2 difficultés se posent :

  • une contrainte technique, liée à la nécessité d’implémenter les nouveaux formulaires dans le dispositif Esteve, justifiant de décaler la campagne. (même si les pré-entretiens avec les présidents de chambre pourront se faire en amont). Il conviendra donc de prioriser les entretiens des magistrats quittant leur juridiction.
  • Il sera probablement nécessaire de décaler les modalités selon lesquelles les chefs de juridiction pourront remonter les informations au secrétariat général.

Le calendrier des suites données aux rapports Massias et Gazagnes :

Si le calendrier de suivi de ces évolutions est, pour l’essentiel, différé au second semestre, plusieurs points ont d’ores et déjà fait l’objet d’une traduction :

  • La réforme de l’évaluation des magistrats (cf point précédent) ;
  • Le renforcement de la DRH sur le volet « aide à la mobilité des magistrats », avec le recrutement effectif d’une collègue ;
  • Une circulaire sera prochainement adressée aux chefs de juridictions en vue d’élaborer une nouvelle version des projets de juridiction ;
  • Le forum des juridictions donne lieu à une réflexion qui pourrait aboutir au cours du second semestre.

L’avenir du CHSCT TA-CAA :

Un décret visant à maintenir le CHSCT des TA et CAA est à l’étude. Il sera l’objet d’un dialogue social au cours du second semestre 2020.

La diffusion et les suites du rapport Stahl sur le contentieux des étrangers :

Si le rapport Stahl a été remis au Premier ministre, il ne peut, pour l’heure, faire l’objet d’une diffusion sans l’autorisation de ce dernier.

(Suite sur le CR diffusé par email )