La place du juge administratif dans la cité selon l’USMA

le juge administratif est tributaire de la conception que les pouvoirs publics se font de son office et des pouvoirs qui lui sont reconnus pour l’exercer.

Or force est de reconnaître que le rôle croissant joué par le juge administratif dans la protection des libertés tranche aujourd’hui nettement avec son manque de visibilité.

Le rôle croissant du juge administratif dans la protection des libertés

jusqu’à la fin du XXème siècle, la fonction du juge administratif est davantage conçue comme celle de réguler l’action de l’administration dans l’intérêt public, le recours pour excès de pouvoir constituant l’arme principale mise à la disposition du citoyen pour défendre la légalité.

A mesure que le juge administratif a limité l’action de l’administration à l’aune des libertés consacrées par le bloc de constitutionnalité, la loi et les principes généraux du droit dégagés par lui, le recours pour excès de pouvoir est devenu un instrument destiné à préserver les libertés publiques.

Conscient de ce que les pouvoirs dévolus au juge administratif n’étaient pas suffisants à eux seuls pour protéger efficacement les libertés, le législateur a consacré de nouvelles prérogatives plus à même de faire entrer pleinement le juge administratif dans le concert des juges protecteurs des libertés individuelles à travers la loi du 8 février 1995, attribuant au juge administratif un pouvoir d’injonction en vue d’assurer l’exécution de la chose jugée, ou encore de la loi du 30 juin 2000 réformant les référés.

Nul doute que le législateur a alors transformé la conception de l’office du juge administratif, qui n’était plus seulement chargé de veiller à la légalité des décisions administratives, mais était également dédié à garantir la pleine et entière protection des droits et libertés fondamentales.

Parallèlement, en tant que juge des mesures de police administrative, le juge administratif a forgé une jurisprudence robuste permettant d’assurer la conciliation entre libertés et ordre public. Il est donc devenu le juge naturel et légitime des mesures de police prises en application de l’état d’urgence, office qu’il a rempli avec compétence et impartialité.

Un paradoxal et surmontable déficit d’image

Il n’en demeure pas moins que, quels que soient ses mérites et ses progrès, la place du juge administratif dans la cité souffre encore d’un déficit d’image.

L’USMA demeure convaincue que l’absence de consécration de la place de la justice administrative dans le texte même de la Constitution participe de ce déficit d’image.

D’ailleurs, Terry Olson faisait le constat(nouveaux cahiers du Conseil constitutionnel n° 37, oct. 2012) que dans la majeure partie des États dotés d’un Conseil d’État ou d’une Cour administrative suprême, l’existence de cette institution était consacrée par le texte même de la Constitution.

Tel est ainsi le cas de l’Allemagne, de la Grèce, des Pays-Bas, de la Pologne, de la République tchèque, de la Suède ou de la Turquie.

A cet égard, en Italie, où le Conseil d’État exerce, comme en France, le rôle de conseiller du Gouvernement et celui de juridiction suprême de l’ordre administratif, cette double mission est consacrée par la Constitution italienne, en ses articles 100 et 103 :

L’Article 100 de la Constitution italienne énonce ainsi : « Le Conseil d’État est un organe de consultation en matière juridique et administrative, et un organe chargé d’assurer la justice au sein de l’administration ». Et l’article 103 de la même Constitution de préciser : « Le Conseil d’État et les autres organes de justice administrative exercent leur juridiction pour assurer la protection, dans les rapports avec l’administration publique, des intérêts légitimes ainsi que des droits subjectifs dans des matières particulières indiquées par la loi ».

L’usma continue donc logiquement de revendiquer la consécration de l’ordre administratif juridictionnel dans le corps de la Constitution. Une telle inscription rendrait davantage visible la justice administrative aux yeux des citoyens , sans impliquer la remise en cause de la double mission du Conseil d’État, à la fois conseiller du Gouvernement et Haute juridiction administrative.

Certes, le Conseil Constitutionnel a reconnu l’indépendance et la compétence de la juridiction administrative pour connaître des actes pris en vertu de prérogatives de puissance publique, en les rattachant aux principes fondamentaux reconnus par les lois de la République par les décisions du 22 juillet 1980 et des 22 et 23 janvier 1987. Bien sûr, la loi nous a enfin désignés comme des « magistrats administratifs » en 2012 puis 2016.

Toutefois, la place affirmée et reconnue de la juridiction administrative dans la cité mérite sans doute mieux que :

– l’actuel article 65 de la Constitution, inséré au titre VIII relatif à l’autorité judiciaire ( !) par la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008, évoquant allusivement l’ « ordre administratif »

– l’article 61-1 de la Constitution, consacré à la question prioritaire de constitutionnalité, (créé par la même loi constitutionnelle), reconnaissant implicitement mais nécessairement l’existence de la fonction juridictionnelle du Conseil d’État mais également, en creux ( !), celle des autres juridictions administratives placées sous son contrôle…

La reconnaissance actuelle – qui n’est qu’implicite – ne présente pas les mêmes garanties d’indépendance et d’impartialité pour le juge administratif. Elle suscite l’incompréhension. Elle brouille l’image de la justice administrative qu’elle soustrait à la visibilité publique et dont elle risque d’entamer la crédibilité.

Elle constitue aujourd’hui, à la vérité, un anachronisme difficile à défendre.

c’est pourquoi, la « reconnaissance par défaut » de la justice administrative doit être prolongée par une inscription explicite de l’existence et de l’indépendance de la juridiction administrative dans la Constitution.

C’est parce que l’USMA croit en l’utilité essentielle de la justice administrative qu’elle défend l’idée et porte la revendication de la consécration constitutionnelle pleine et entière de la justice administrative.

L’USMA ne veut plus jamais que la suspicion pèse sur l’impartialité et l’indépendance du magistrat administratif et qu’elle alimente les querelles et les idées fâcheuses de nature à mettre en péril sa légitimité et donc sa place même au sein des institutions françaises.

votez pour l’usma, vous défendrez avec nous, pour vous, la place du juge administratif dans la cité, sa légitimité et sa singularité !