Réforme de la haute fonction publique : entretien avec la conseillère de la ministre de la transformation et de la fonction publiques

L’USMA a, dans le cadre du projet d’ordonnance de la haute fonction publique, sollicité de nombreux entretiens auprès du gouvernement et de la présidence de la République afin que notre voix de magistrats administratifs soit entendue directement. Nous avons également organisé une réunion avec les autres syndicats des magistrats financiers et judiciaires.  

L’entretien que nous avons eu aujourd’hui avec le cabinet de Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques a porté sur les points suivants :

  • Concernant le recrutement, un arbitrage est toujours en cours sur la sortie directe dans les TA/CAA après la scolarité dans le futur Institut du service public (ISP). Nous avons réaffirmé, conformément à notre livre blanc, notre attachement aux recrutements diversifiés (concours, tour extérieur, détachement, sortie ENA, désormais ISP).  
  • Concernant la formation, il n’est plus question de créer un cursus unique. L’ISP prévoirait néanmoins un tronc commun pour les différentes écoles (avec des grands thèmes transversaux comme la transition numérique, l’écologie, les principes et valeurs républicains, le rapport à la science…). La formation CFJA serait maintenue et ne devrait pas être affectée dans un premier temps même s’il semble intéressant de permettre aux futurs magistrats administratifs de suivre ces modules de formation.  
  • Concernant la carrière, et il s’agissait du cœur de nos échanges, le principe d’une mobilité à chaque changement de grade semble faire partie des principes arbitrés pour toute la haute fonction publique. Dès lors que la volonté est que cette mobilité soit décloisonnée pour les administrateurs de l’Etat, la suppression de la « dispense » par la CAA semble être envisagée.

Pour le cabinet, il ne s’agit pas de gagner des compétences managériales, comme le laissent penser nos orientations, mais de permettre des mobilités différentes, des enrichissements mutuels et des acquisitions de savoir.  

Nous avons signifié notre vive opposition sur le sujet tel qu’il est pensé et dit que nous ne devons pas être les victimes collatérales de cette réforme. Nous avons insisté sur la nécessité d’une magistrature de carrière, la spécificité du juge administratif et l’actuelle richesse de notre corps qui provient d’un recrutement diversifié. Nous avons souligné les difficultés des magistrats, notamment hors Ile-de-France, pour effectuer des mobilités et avons défendu le maintien d’une dispense par un passage en CAA.  

Le cabinet a reconnu la spécificité de notre métier, admis l’importance de notre indépendance et de son corolaire l’inamovibilité ainsi que la nécessité d’avoir des garanties (nous avons bien évidemment saisi l’occasion pour rappeler l’importance, surtout dans ce contexte, du port de la robe et de la prestation de serment).  Tout en louant l’expertise reconnue et recherchée des magistrats administratifs, il a semble-t-il été sensible à nos arguments sur les difficultés pour effectuer des mobilités compatibles avec notre métier et nous l’espérons sur l’indépendance.   

Par ailleurs, la réforme telle qu’elle est pensée, indistinctement pour tous les hauts fonctionnaires, risque aussi d’avoir une incidence sur l’attractivité de notre corps, notamment pour les collègues en détachement. Nous avons aussi insisté sur le fait que le régime indemnitaire n’était pas à la hauteur de nos fonctions et que cette situation doit être revue au risque là encore d’aggraver cette perte d’attractivité pour notre métier.  

Enfin nous avons insisté sur le fait que la nomination des présidents notamment de tribunaux ne pouvait pas échapper à la compétence du CSTA notamment par le passage par une formation différence et qu’un président de juridiction doit avoir fait principalement sa carrière au sein celle-ci.  

Nous avons ainsi réaffirmé notre fierté d’être magistrats et que le projet en l’état porte atteinte à notre indépendance, à notre métier de juge, à une magistrature de carrière et de métier ainsi qu’au principe d’inamovibilité.  

Les versions de l’ordonnance qui circulent actuellement semblent encore incomplètes. Le CSTA concernant ce texte est prévu début mai.

Nous restons pleinement mobilisés.