11 décembre 2018
Compte rendu de visite
Tribunal administratif de Montreuil
Une délégation de l’USMA (Ivan Pertuy, Ophélie Thielen) s’est rendue au tribunal administratif de Montreuil ce 11 décembre. Nous remercions chaleureusement l’ensemble des magistrats présents pour l’accueil qu’ils nous ont réservé.
Situation du tribunal
Situation générale
Le ressort du tribunal couvre le département de la Seine-Saint-Denis et l’intégralité de l’emprise de l’aérodrome de Paris – Charles-de-Gaulle.
Le tribunal est compétent depuis le 1erjanvier 2017 pour les étrangers placés en rétention dans le centre de rétention administrative n°3 du Mesnil-Amelot.
Le tribunal est composé de dix chambres et 38 magistrats, mais 8 VP seulement en exercice actuellement, sept à compter du 1erjanvier 2019, ainsi que d’un premier VP.
Points positifs du tribunal
Les magistrats sont nombreux, intéressés par la vie collective de leur juridiction, et l’ambiance est studieuse et franchement sympathique.
Les locauxdu tribunal administratif de Montreuil, que ceux qui se sont rendus au CFJA connaissent, sont confortables.Les bureaux sont individuels et correctement équipés (mobilier moderne). Le tribunal est situé à deux pas du métroRobespierre, dans un quartier animé, qui permet de se restaurer honorablement pour des prix acceptables.
Le contentieux fiscal du tribunal administratif de Montreuil est spécifique et particulièrement intéressant,du fait de la présence de grandes directions ministérielles. Nos collègues prennent ainsi en charge des dossiers à très fort enjeux et connaissent de contentieux qui ne sont jugés que par eux, par la Cour administrative d’appel de Versailles et le Conseil d’Etat. Une même spécificité existe dans la chambre « Santé », du fait de la présence dans le ressort du tribunal de plusieurs agences nationales, dont l’agence nationale du médicament.
Points négatifs du tribunal
L’instauration de permanences 72 heuresa, comme dans la plupart des tribunaux, perturbé le travail collégial, et si les permanences demeurent, pour l’heure, supportables, les magistrats sont très inquiets des conséquences de l’entrée en vigueur le 1erjanvier 2019 de la loi pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie, qui étend l’intervention du juge des 72 heures ou six semaines à certains refus de séjour et qui crée le contentieux de la suspension éloignement des demandeurs d’asile après intervention de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides et avant l’arrêt de la Cour nationale du droit d’asile.
Déménagement. Le tribunal doit en principe s’installer avec la Cour nationale du droit d’asile, à compter de l’année 2022, dans d’anciens locaux de l’AFPA (25 000 m2), situés au 13 place du général de Gaulle, à 10 minutes de la station « Mairie de Montreuil », terminal de la ligne de métro n°9. Plusieurs magistrats nous ont dit ne pas être très inquiets, pour l’heure, de ce déménagement, tout en précisant qu’ils envisageront de quitter le tribunal lorsque le déménagement sera effectif.
Pas de restaurant administratifdepuis que celui du tribunal a été fermé il y a deux ans, fermeture à laquelle les magistrats s’étaient opposés en vain et regrettent.
Trois chambres n’ont pas de présidentet deux premiers conseillers faisant fonction de président vont être désignés, à l’issue d’un appel à candidature lancé, de manière transparente, par le président, le jour de notre visite.
Organisation de la visite
Rencontre du chef de juridiction
Nous avons tout d’abord rencontré le chef de juridiction, M. Christophe Laurent, qui nous a accueillis très agréablement et que nous remercions d’avoir facilité autant que possible le déroulement de la visite, aux côtés de son assistante Mme Couty.
Conférences en salle d’audience avec la collectivité juridictionnelle
La visite s’est poursuivie par deux conférences tenues en salle d’audience.
La première conférence, de 10h30 à 11h30, a eu pour objet, en présence du chef de juridiction, de présenter succinctement aux magistrats les modalités d’organisation des débats nationaux et le positionnement général de l’USMA dans ces instances.
Nous avons évoqué les principales revendications de l’USMA (reconnaissance constitutionnelle, RPS, charge de travail, amendement mobilité, etc.) et répondu aux interrogations et contradictions des magistrats.
Nous avons évoqué la conférence de gestion.
La seconde conférence, de 11h30 à 12h30, avait pour objet de recueillir la libre parole collective des magistrats et vice-présidents, qui a été également recueillie individuellement auprès d’eux dans l’après-midi.
Teneur des débats :
Le tribunal sera en difficulté à compter du premier janvier puisque trois postes de président de chambre seront alors vacants. Il est difficilement compréhensible pour les magistrats que cette situation, connue du Conseil d’Etat, n’ai pas trouvé de solution, même partielle, dans le cadre de la conférence de gestion. Le tableau d’avancement au grade de président 2018 n’est pas encore vide et demeure valable jusqu’à l’établissement du tableau d’avancement suivant, et au moins un poste de VP aurait pu être pourvu de cette manière, les deux autres postes demeurant en tout état de cause accessibles lors du mouvement de mutation. La solution à la vacance d’emploi proposée à titre palliatif par le président, source d’un jeu de chaises musicales au sein du tribunal, inquiète quelque peu.
Il a été souligné également que les moyens alloués cette année à la juridiction administrative, de 10 emplois, pour toutes les juridictions, contrastaient avec l’effort extrêmement important effectué au profit de la Cour nationale du droit d’asile. L’USMA relève en effet que l’incapacité du législateur et du pouvoir réglementaire à réformer l’asile en particulier, et à simplifier le droit des étrangers en général, conduit à une répartition des moyens particulièrement contestable, au détriment des autres contentieux.
L’engorgement de l’accès au grade de président a été fréquemment évoqué, et nous avons présenté à certains magistrats notre souhait de voir mettre en place des fonctions de président alternatives à celles de VP de chambre, par la distinction grade-fonction.
Dans l’ensemble, les magistrats sont assez satisfaits de leur environnement de travail, dès lors que les dossiers sont raisonnablement dématérialiséset qu’ils ont la possibilité d’imprimerlorsqu’ils le souhaitent. Certains d’entre eux ont néanmoins souligné que rémunérer des hauts-fonctionnaires pour leur faire réaliser des impressions était peut-être un gâchis d’argent public. Nous ne sommes pas parvenus à les contredire.
L’ambiance dans le tribunal est, aux dires de tous, beaucoup plus sereine qu’elle a pu l’être.
Le stock est relativement jeune et exige une instruction très active. Mais les magistrats ont aussi la sensation d’être utiles en tranchant des litiges qui conservent leur actualité.
Compte rendu
Les entretiens individuels avec les magistrats ont été placés sous le sceau de la confidentialité. A l’issue de la visite, nous avons évoqué avec M. le Président Laurent les requêtes collectives et les situations individuelles que les magistrats ont souhaité lui voir transmettre.
Notre prochaine visite sera organisée à la Cour administrative d’appel de Paris.